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Demain l’Insurtech : 4 questions à Rémi Villiers-Moriamé

Rémi Villiers-Moriamé.pngRémi Villiers-Moriamé

Consultant et CEO de la regtech INSquary.

Il accompagne les acteurs du monde de l’assurance en matière d’innovation, de conformité, d’organisation des fonctions Finance et Investissements.

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Demain l’assurance : Data et assurance : Simple renouveau ou relais de croissance ?

Rémi Villiers-Moriamé : Je me souviens du responsable comptable de la direction Réassurance d’un grand assureur dans les années 1990. Il tenait sa compta à la main, plus précisément sur des grands cartons préimprimés, un peu jaunes. Beaucoup de chemin a été parcouru depuis, mais autant reste à parcourir, en termes de disponibilité des données (nature, niveau de détail, profondeur historique, …), de traçabilité, d’immédiateté, de fiabilité… L’enjeu est très important pour toutes les parties prenantes dans le secteur de l’assurance, dont le métier est précisément de consommer et produire de la donnée, d’autant que le parcours de ces données (qui ne sont que partiellement normées) subit beaucoup d’à-coups et de transformations du fait du fractionnement des chaînes de valeur : les processus impliquent un nombre croissant d’intervenants dotés de systèmes hétérogènes et pas toujours facilement interopérables. Les réglementations autour des données et de leur protection se multiplient d’ailleurs (Solva II, RGPD, OSE/OIV, Guidelines de l’EIOPA sur le cloud, …).

Demain l’assurance : L’éthique devient-elle une dimension incontournable, ou juste le sujet d’un nouveau « greenwashing » ?

Rémi Villiers-Moriamé : L’éthique, c’est une approche qui permet de traiter une activité en tenant compte de dimensions morales. Le greenwashing, c’est l’écart entre la pratique affichée et des normes quand celles-ci sont insuffisamment précises ou contraignantes. Comme on ne peut pas laisser la bonne marche des affaires dépendre de la conscience de chacun, on assiste à une tendance de fond d’inscription dans la « hard law » de normes de toutes sortes, qui permettent de guider et souvent de limiter l’activité des entreprises. Il s’agit de préserver l’intérêt collectif, et tant mieux s’il converge avec des préoccupations morales ou civiques.

Ces normes trouvent souvent leur source dans des textes de l’Union européenne, louée soit-elle. Dans notre secteur d’activité, on peut citer comme exemples les actions en matière de protection de la clientèle (directive sur la distribution dans l’assurance), de lutte anti-blanchiment (l’UE devrait se doter prochainement d’une Autorité anti-blanchiment), de publications d’indicateurs sur les investissements durables (règlement SFDR qui est au sens strict anti-greenwashing, initiatives du gouvernement français autour de la finance à impact, …), …

Après, il se trouve que le secteur de l’assurance est plus facilement perméable à des attitudes conformes avec l’intérêt collectif de long terme ; d’abord parce qu’elle y a souvent intérêt, notamment en matière de dérèglement climatique (voir à ce sujet l’intéressante cartographie des risques établie en début d’année par la FFA) ; ensuite parce qu’une bonne partie du secteur est mutualiste et donc détaché de certains enjeux court-termistes. Il est possible que le choix d’un statut d’entreprises « à mission » soit amené à se multiplier, au-delà de l’effet de mode. Mais là aussi, pour éviter le greenwashing, mieux vaut formaliser clairement les engagements et leurs modalités de suivi (reporting, comitologie, …).

Demain l’assurance : L’innovation part-elle de la technique ou du client ?

Rémi Villiers-Moriamé : Les deux, Mon Général ! Plus sérieusement, il y a des innovations à tout moment, mais elles ne décollent que s’il y a une rencontre entre une offre – qui s’appuie en effet sur des évolutions techniques – et les attentes des clients.

Je me souviens avoir passé du temps il y a une quinzaine d’années à faire de l’évangélisation sur le « pay-as-you-drive », qui devait révolutionner l’assurance auto, et qui a fait un relatif flop, parce qu’il n’a pas rencontré une attente de la part des consommateurs. A l’inverse, un certain nombre de pratiques des assureurs sont en train d’évoluer du fait de la demande. C’est le cas par exemple des échanges de flux financiers : les assurés dans certains cas (assistance, catastrophe, …) s’attendront à être indemnisés par des virements instantanés (sans attendre 24 ou 48 h), ou à pouvoir payer leurs cotisations en deux clics sur leur Smartphone.

Ce qui est difficile pour les comités de direction des assureurs, c’est de tenir plusieurs postures simultanément : garder un œil sur les tendances innovantes (veille), lancer des expérimentations (ce que tout le monde ne peut pas faire : il y a des pionniers – qui se plantent parfois, mais il y a un aléa, on ne peut pas le savoir à l’avance – et des suiveurs), et conduire le « business as usual ».

Demain l’assurance : Startups et grands groupes assurantiels : ennemis ou complémentaires ?

Rémi Villiers-Moriamé : Osons la synthèse avec le mot-valise « coopétiteurs » : l’océan est assez vaste pour accueillir des cétacés et des poissons-pilotes.

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