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Insurtech - Page 4

  • Demain l’Insurtech : 3 questions à João Cardoso

    Cardoso.jpgJoão Cardoso

    João Cardoso est originaire de Leiria (Portugal). En 2005, il débute sa carrière à Londres chez Morgan Stanley. Dès 2011, il crée TaCerto.com, le premier comparateur d'assurance au Brésil, aujourd'hui leader de son secteur. En 2016, il fonde VisionX, plateforme permettant aux agences immobilières brésiliennes de proposer des produits d'assurance à leurs clients. En 2017, il crée Lovys en France avec l'ambition de changer l'expérience client dans le monde de l’assurance.

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    Demain l’assurance : La crise sanitaire a-t-elle réellement changé la donne, ou le business repartira as usual ?

    João Cardoso : La pandémie a entraîné une évolution des besoins des Français, et poussé les assureurs à s’adapter. L’agence d’assurance n’est pas un commerce essentiel, a décidé le gouvernement lorsqu’il a annoncé le premier confinement.  Pour autant, les Français ont, plus que jamais, besoin d’assurance, qui reste bien un service de première nécessité.

    Le Covid a révélé l’importance d’un contact en temps réel avec son assureur - ne serait-ce que pour mettre en place sereinement le télétravail. Rapatrier son bureau à la maison a ainsi imposé à certains de déclarer ce changement à leur assureur, et parfois de se procurer - et assurer - du nouveau matériel (ordinateur, imprimante…). Si les Français ont réduit significativement leurs déplacements en voiture, l’augmentation de leur présence à la maison a fait émerger de nouveaux besoins. Des changements de styles de vie qui auraient dû s'accompagner d’une évolution de leurs assurances - ce qui n’est pas toujours aisé à faire, et devrait l’être !

    En réalité, le besoin de flexibilité, de transparence, de simplicité dans l’assurance était déjà présent - et la crise sanitaire n’a fait que l’accélérer. C’est la raison pour laquelle nous avons observé une forte augmentation des nouveaux assurés de Lovys, demandeurs de produits d’assurance adaptables et accessibles sur une interface unique, en ligne. Et je suis persuadé que cette tendance va continuer, notamment du fait du climat d’incertitude qui va perdurer dans les mois à venir.

    Demain l’assurance : L’innovation part-elle de la technique ou du client ?

    João Cardoso : L’innovation part du client, puisque l’assurance part du client. Un assureur qui met l’innovation technique au centre de sa proposition risque de se perdre en même temps qu’il perd de vue ce qu’attendent réellement ses assurés. Les Français, par exemple, demandent plus de flexibilité dans leurs assurances. La technique doit être mise au service de ce processus centré sur le client.

    Parce qu’un produit inédit n’est pas innovant s’il n’apporte pas une réponse à un besoin du client. Certains assureurs mettent en place des innovations fortes, mais pourtant les clients vont chez les “néo-assureurs” comme nous. Pourquoi ? Parce que leurs besoins sont au centre de toute notre démarche. Lovys n’a pas été créé pour réinventer la distribution des produits seulement - comme un courtier pourrait le faire - puisque le besoin des consommateurs allait au-delà : il s’agit de repenser les produits dans leur totalité. C’est pourquoi nous créons nos produits nous-mêmes, avec nos assurés et des partenaires réassureurs.

    Demain l’assurance : Empathie et assurance : antinomiques ou complémentaires ?

    João Cardoso : L’assurance implique l’empathie. Par empathie, je n’entends pas penser à la place de nos clients et imaginer ce qu’ils pourraient attendre de nous. Il s’agit de leur demander leur avis à tous les niveaux : création du produit, élaboration et test du parcours client … C’est ce que nous avons fait l’année dernière lorsque nous nous sommes intéressés au rapport des jeunes générations à leurs assurances. Nous avons réalisé par exemple qu’en France, plus de 30% des 18-24 ans ne savent pas combien de contrats d’assurance ils ont, ni combien ils dépensent en assurance !

    Le constat est simple : en France, plus de la moitié des personnes n’ont pas confiance en leur assureur (YouGov pour LeComparateurAssurance, 2019). Ce qui signifie que nous devons faire mieux en matière de compréhension des besoins. Concrètement, il est essentiel de multiplier les contacts avec les assurés. Nous nous sommes rendus compte que les consommateurs cherchent avant tout des prix attractifs, la simplicité et la flexibilité chez leurs assureurs. C’est pourquoi nous proposons quatre produits d’assurance, réunis en un seul abonnement mensuel, que l’assuré peut faire évoluer à tout moment.

     

  • Demain l’Insurtech : 3 questions à Raphael Jabol

    Raphael Jabol - Copie.jpgRaphael Jabol

    Raphaël Jabol est le cofondateur et CEO d'Avostart. Raphaël a grandi à Bobigny en Seine-Saint-Denis ; c'est pourquoi il est particulièrement sensible aux questions d’accessibilité du droit.

    Il est diplômé de Sciences Po Paris et de la Johns Hopkins University. Raphaël a contribué au lancement de produits à New York, Paris ou encore Rio de Janeiro au sein du Groupe L'Oréal avant de lancer Avostart.

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    Demain l’assurance : S’achemine-t-on vers des stratégies tout digital ou le phygital trouvera-t-il toujours sa place ?

    Raphael Jabol : Les besoins juridiques sont souvent à l’origine d’une importante charge mentale pour les utilisateurs : suspension d’un permis de conduire, relation entre propriétaire et locataire ou retard de livraison etc. C’est pourquoi ils souhaitent obtenir des réponses rapides et précises par des experts. Ces problématiques du quotidien sont pourtant difficilement résolues en raison du coût, de la difficulté à trouver un professionnel compétent et de la complexité du droit.

    Grâce à la technologie, une simple requête débouche sur une recommandation personnalisée et optimisée qui simplifie considérablement l’accès au droit. Par ailleurs, les outils digitaux permettent une meilleure réactivité grâce à l’évaluation de la satisfaction quasi instantanée des utilisateurs ou la mise à disposition de canaux de communication adaptés à chaque besoin.

    La dématérialisation rend néanmoins difficile l’identification des interlocuteurs : service clients de site internet non joignables ou basés à l’étranger. Ceci est bien souvent une source d’anxiété et/ou de frustration pour les utilisateurs. Au vu des enjeux inhérents à un besoin juridique, le contact physique avec un professionnel du droit demeure, en effet, indispensable pour garantir un lien de confiance avec le client et le rassurer rapidement sur ses interrogations légales.

    En définitive, nous pensons que le phygital sur ce type de problématiques aura toujours sa place.

    Demain l’assurance : L’innovation part-elle de la technique ou du client ?

    Raphael Jabol : L’innovation pour créer une réelle rupture d’usage doit répondre à un besoin client.

    Les besoins juridiques sont le quotidien des français : achats sur internet, problèmes de caution, dégâts des eaux, amendes, etc. Pourtant, 4 français sur 5 s’estiment incapables de trouver une solution lorsqu’ils font face à un problème juridique. C’est en partant de ce constat, qu’il est alors possible de trouver de réelles solutions ayant un impact positif significatif pour le client. Plus les freins ou difficultés rencontrées sont clairement identifiés plus l’innovation sera génératrice de valeur pour le client.

    Plus globalement, la détermination des besoins du client permet de développer efficacement des solutions technologiques - utilisation du mécanisme test & learn, nouvelles fonctionnalités, service plus intuitif -  vouées à assurer la pleine satisfaction du client.

    Demain l’assurance : Startups et grands groupes assurantiels : ennemis ou complémentaires ?

    Raphael Jabol : Les grands groupes assurantiels détiennent une excellente expertise métier du fait de leur taille et de leur ancienneté. L’intégration de l’innovation au sein de leurs structures constitue néanmoins un coût important dont le processus est souvent complexe et long à mettre en place. Les startups, quant à elles, encore en phase de construction, sont plus agiles pour appréhender ces évolutions technologiques. Par nature, il est plus facile de s’adapter aux usages, continuellement changeants.

    La collaboration entre grands groupes et startups est la clé pour permettre l’accès à l’innovation au plus grand nombre. Par ailleurs, elle accélère considérablement le transfert de compétences dans les deux sens.

    Un écosystème vertueux se consoliderait en unifiant d’un côté, la solide expérience des compagnies d’assurance et de l’autre, la facile adaptabilité technique des startups.

  • Demain l’Insurtech : 4 questions à Rémi Villiers-Moriamé

    Rémi Villiers-Moriamé.pngRémi Villiers-Moriamé

    Consultant et CEO de la regtech INSquary.

    Il accompagne les acteurs du monde de l’assurance en matière d’innovation, de conformité, d’organisation des fonctions Finance et Investissements.

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    Demain l’assurance : Data et assurance : Simple renouveau ou relais de croissance ?

    Rémi Villiers-Moriamé : Je me souviens du responsable comptable de la direction Réassurance d’un grand assureur dans les années 1990. Il tenait sa compta à la main, plus précisément sur des grands cartons préimprimés, un peu jaunes. Beaucoup de chemin a été parcouru depuis, mais autant reste à parcourir, en termes de disponibilité des données (nature, niveau de détail, profondeur historique, …), de traçabilité, d’immédiateté, de fiabilité… L’enjeu est très important pour toutes les parties prenantes dans le secteur de l’assurance, dont le métier est précisément de consommer et produire de la donnée, d’autant que le parcours de ces données (qui ne sont que partiellement normées) subit beaucoup d’à-coups et de transformations du fait du fractionnement des chaînes de valeur : les processus impliquent un nombre croissant d’intervenants dotés de systèmes hétérogènes et pas toujours facilement interopérables. Les réglementations autour des données et de leur protection se multiplient d’ailleurs (Solva II, RGPD, OSE/OIV, Guidelines de l’EIOPA sur le cloud, …).

    Demain l’assurance : L’éthique devient-elle une dimension incontournable, ou juste le sujet d’un nouveau « greenwashing » ?

    Rémi Villiers-Moriamé : L’éthique, c’est une approche qui permet de traiter une activité en tenant compte de dimensions morales. Le greenwashing, c’est l’écart entre la pratique affichée et des normes quand celles-ci sont insuffisamment précises ou contraignantes. Comme on ne peut pas laisser la bonne marche des affaires dépendre de la conscience de chacun, on assiste à une tendance de fond d’inscription dans la « hard law » de normes de toutes sortes, qui permettent de guider et souvent de limiter l’activité des entreprises. Il s’agit de préserver l’intérêt collectif, et tant mieux s’il converge avec des préoccupations morales ou civiques.

    Ces normes trouvent souvent leur source dans des textes de l’Union européenne, louée soit-elle. Dans notre secteur d’activité, on peut citer comme exemples les actions en matière de protection de la clientèle (directive sur la distribution dans l’assurance), de lutte anti-blanchiment (l’UE devrait se doter prochainement d’une Autorité anti-blanchiment), de publications d’indicateurs sur les investissements durables (règlement SFDR qui est au sens strict anti-greenwashing, initiatives du gouvernement français autour de la finance à impact, …), …

    Après, il se trouve que le secteur de l’assurance est plus facilement perméable à des attitudes conformes avec l’intérêt collectif de long terme ; d’abord parce qu’elle y a souvent intérêt, notamment en matière de dérèglement climatique (voir à ce sujet l’intéressante cartographie des risques établie en début d’année par la FFA) ; ensuite parce qu’une bonne partie du secteur est mutualiste et donc détaché de certains enjeux court-termistes. Il est possible que le choix d’un statut d’entreprises « à mission » soit amené à se multiplier, au-delà de l’effet de mode. Mais là aussi, pour éviter le greenwashing, mieux vaut formaliser clairement les engagements et leurs modalités de suivi (reporting, comitologie, …).

    Demain l’assurance : L’innovation part-elle de la technique ou du client ?

    Rémi Villiers-Moriamé : Les deux, Mon Général ! Plus sérieusement, il y a des innovations à tout moment, mais elles ne décollent que s’il y a une rencontre entre une offre – qui s’appuie en effet sur des évolutions techniques – et les attentes des clients.

    Je me souviens avoir passé du temps il y a une quinzaine d’années à faire de l’évangélisation sur le « pay-as-you-drive », qui devait révolutionner l’assurance auto, et qui a fait un relatif flop, parce qu’il n’a pas rencontré une attente de la part des consommateurs. A l’inverse, un certain nombre de pratiques des assureurs sont en train d’évoluer du fait de la demande. C’est le cas par exemple des échanges de flux financiers : les assurés dans certains cas (assistance, catastrophe, …) s’attendront à être indemnisés par des virements instantanés (sans attendre 24 ou 48 h), ou à pouvoir payer leurs cotisations en deux clics sur leur Smartphone.

    Ce qui est difficile pour les comités de direction des assureurs, c’est de tenir plusieurs postures simultanément : garder un œil sur les tendances innovantes (veille), lancer des expérimentations (ce que tout le monde ne peut pas faire : il y a des pionniers – qui se plantent parfois, mais il y a un aléa, on ne peut pas le savoir à l’avance – et des suiveurs), et conduire le « business as usual ».

    Demain l’assurance : Startups et grands groupes assurantiels : ennemis ou complémentaires ?

    Rémi Villiers-Moriamé : Osons la synthèse avec le mot-valise « coopétiteurs » : l’océan est assez vaste pour accueillir des cétacés et des poissons-pilotes.