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Demain l'assurance - Page 15

  • Covid, confinement, intermédiation et assurances

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    Olivier Blandin

    ACCRMA / Assurances Courtage Conseil Risk Management Associés

    Financial Lines Insurance Broker

    Une révolution digitale menée par un virus ?

    La crise sanitaire actuelle dans l’ensemble de ses dimensions : confinement, gestes barrières,  distanciation sociale accélère la transformation digitale du secteur de l’assurance. D’aucuns commencent à évoquer la crise comme un des leviers majeurs de l’accélération de la IVème Révolution Industrielle.

    Soudainement sous l’effet d’un virus, des solutions longtemps perçues comme impossibles ou inadaptées au secteur, deviennent possibles et encouragées. Que l’on songe au télétravail, refusé à la fois par les DSI ou les partenaires sociaux et les Directions Générales de Compagnies, qui du jour au lendemain se retrouve développé et amplement généralisé. La mise en place d’une réelle approche phygitale de la relation client, reposant à la fois sur de l’humain mais aussi sur des processus digitaux comme la numérisation du parcours client ou la mise en place de la signature électronique. Partout, la même logique de généralisation à marche forcée.

    Révolution digitale faite par un virus ? En partie vrai, mais le raccourci est un peu hâtif. En matière historique, chaque Révolution connait son évènement déclencheur, qui n’est en fait que l’aboutissement d’une série de signaux faibles. Le 14 juillet 1789 symbole pour beaucoup de la Révolution Française n’est ainsi que la suite de périodes de disette, de la non réunion des Etats Généraux depuis 1614, ou de tout autre évènement comme des hivers très rudes, de mauvaises récoltes et une forte hausse du prix du pain entre 1787 et 1789 (+75 %).

    Il en est de même en matière d’assurance et d’intermédiation.  Ces évolutions / révolutions de la Relation Client que nous constatons à l’heure du confinement, sont la suite de mouvements plus profonds portés en partie par les « GAFA » mais aussi par l’ensemble des secteurs Insurtech et Fintech comprises. Une révolution sur base d’industrialisation, de simplification de l’expérience client, de multi-accès, de cross et de multicanal. Notions disparates mais réunies à l’heure du confinement.

    Des réseaux de distribution résilients ?

     Au-delà de ces premiers aspects, les Directions de compagnies reconnaissent la forte capacité de résilience des distributeurs d’assurance. Cette capacité d’adaptation se traduisant par l’apprentissage de nouveaux outils et gestes métiers liés à la relation client à distance. Nouvelles techniques de vente, sur base de Zoom, Teams et autres outils, faite d’expertise et de conseil et moins de techniques de ventes « traditionnelles « . Adaptation aussi en termes d’organisation du travail, de management, et de ressources humaines. Le collaborateur d’agence n’étant plus lié à un lieu physique, ni lié à une supervision constante, de nouveaux modèles de management sont à construire. Adaptation constatée tant au niveau des réseaux propriétaires Agents ou salariés qu’au niveau des réseaux indépendants comme les courtiers ou les CGP.

    Les intermédiaires d’assurance, à l’instar des personnels de santé, ont été en première ligne pour gérer les aspects négatifs de la pandémie, et maintenir la qualité de relation client. Face à la perte d’exploitation et aux déboires judiciaires de certains assureurs, les distributeurs d’assurance, agents généraux ou courtiers, ont joué à fond leur rôle d’intermédiaires entre des clients désespérés et des compagnies parfois un peu sourdes. Face à un discours parfois trop institutionnel des compagnies, les intermédiaires ont su valoriser leur rôle d’accompagnement terrain, savant mélange de cocooning et de gestes commerciaux même minimes (deux mois gratuits, absence de facturation de frais de fractionnement, …). Côté négatif de la pandémie, certains intermédiaires voient leur responsabilité mise en jeu au titre de l’obligation de conseil. Certains assureurs leaders sur le marché de la RC Intermédiaire ont d’ailleurs commencé à résilier en masse ces polices. Sur la mise en jeu de la responsabilité civile des intermédiaires, sommes-nous à l’origine d’un mouvement plus large, le début d’une nouvelle vague ?

    Et après ?

    Globalement Relation client à distance et Expérience client modifiée entraînent un changement en profondeur du modèle de distribution de l’assurance.

    A l’heure d’une possible troisième vague, ces changements sont-ils pérennes ?  Le télétravail ? Des pans entiers de l’économie se mobilisent pour en faciliter le déploiement : Ergothérapeutes, entreprises de services numériques, centres de formation. La vente à distance ? Le secteur de l’intermédiation apprend, adapte ses pratiques, encadré par la DDA en gardant à l’esprit l’attention croissante à l’obligation de conseil.  L’Expérience client augmentée ? Les Lab de compagnies, les insurtech, les fintech, les startups, les GAFA réinventent la relation client de demain. Chatbots, AI, l’ensemble des outils sont mobilisés.

    Quelles conséquences ?  La relation client plus fluide nécessitera sans doute des effectifs plus réduits. Les points de vente assurance connaitront-ils le même destin que les centres de relation clients des banques ? La réduction des surfaces et des frais généraux améliorera sans doute les comptes de résultat des nouveaux distributeurs. Le modèle traditionnel constitué d’un ou plusieurs points de vente attachés à une zone de chalandise spécifique, va-t-il s’estomper pour être remplacé par des modèles plus automatisés, s’appuyant sur une relation client à distance ?   En termes humains, les profils actuels de distributeurs seront-ils en mesure d’accompagner ces changements en profondeur des business modèles.

    Les intermédiaires d’assurance traditionnels sont-ils amenés à évoluer pour devenir nomades et agiles ?  L’avenir n’est jamais totalement tracé, mais dès à présent compagnies et distributeurs travaillent à bâtir la relation client de demain. Plus digitale certes, mais sera-t-elle en mesure de conserver un semblant de dimension humaine ?

  • Virus, infections et Histoire

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    Michel Revest

    Ancien-Directeur Recherches & Innovation d’un groupe d’assurance

    Membre du Pôle Finance Innovation

    Pour une interprétation historique de la Covid 19.

    L’histoire humaine a été façonnée, forgée par les épidémies, les maladies infectieuses. Toute l’humanité aurait pu être éliminée  par les virus et autres infections et l’a été en certains lieux. Les maladies infectieuses et virales sont à l’origine de la disparition de cultures  humaines et de la suprématie d’autres. Si elles sont un fléau, elles ont été une arme pour les vainqueurs de l’expansion de l’espèce sapiens sapiens, l’humanité actuelle.

    La domestication d’espèces animales a mis en contact les agriculteurs sédentaires avec les virus et autres infections dont avec le temps elles ont été protégées, « vaccinées ». Les agriculteurs ont ainsi occupé les terres et éliminé la plupart des chasseurs-cueilleurs. Les colonisateurs, sans le savoir, ont bénéficié de cette arme plus efficace que leurs armes terrestres, comme ce fut le cas en Amérique des conquistadors espagnols et portugais. Pour nous, les vainqueurs, les virus des animaux n’ont pas été toujours le mal. La protection  des populations au contact de ses animaux domestiqués a été un bouclier. Les virus n’ont pas été un problème mais une des clés de la suprématie de nombre de peuples actuels.

    Mais, selon un autre point d’analyse, l’humanité de siècle en siècle a été éliminée, réduite dans son temps de vie par les maladies infectieuses. La norme était de mourir jeune, car on mourrait de telles infections et ce jusqu’à des temps très proches. Personne ne prétendait  vaincre ces maladies, c’était la nature voulue par nos  dieux qui réduisait notre espérance de vie. Les maladies infectieuses, les virus,  faisaient partie du monde, de la vie normale ; l’humanité les subissait et ne pouvait pas les vaincre ; elles étaient la volonté de puissances supérieures ; les religions les faisaient accepter à des peuples résignés.

    La règle pour la plupart était de mourir jeune. Ce sont les progrès de la médecine, de Pasteur, de l’hygiène, de la découverte des microbes qui ont permis de vaincre les maladies infectieuses ; on vit plus longtemps dans le monde moderne, on vit mieux parce qu’on a vaincu les maladies infectieuses et virales. L’essor du développement des sociétés et de leur économie, bien plus que la vapeur et l’électricité, présentées comme les révolutions du 19ème à l’origine des sociétés modernes,  est dû à la victoire de l’humanité sur ce qui la tuait précocement, les infections et virus. Elle lui a donné son bien le plus précieux, le temps.

    La Covid nous fait revenir à nos origines ; c’est un choc ! Il y a eu des précurseurs récents, SARS, MERS, H1N1 et les grippes du 20e siècle dont la grippe dite « espagnole » qui  semblait venir de Shanghai et a été diffusée par l’intermédiaire des soldats américains en étant responsable de la disparition de 2.5 à 5 % de la population mondiale.

    On retrouve notre fragilité originelle, première. On avait oublié ce qu’on était et qui était toujours présent ; la grippe espagnole a été bien pire que la Covid 19 sans que l’on en en ait conscience et pris aucune des mesures actuelles ; les effets et conséquences de la deuxième guerre mondiale ont effacé la grippe espagnole de nos mémoires qui aurait fait 175 à 300 millions de morts avec le niveau de la population mondiale actuelle. Les virus ont toujours été là, venant du même endroit, la Chine, à quelques exceptions près (Sida, Ebola). Avec toujours la même cause, la proximité des humains avec les animaux. Tous les progrès qui nous font vivre vieux semblent effacés avec la Covid qui menace précisément surtout les plus âgés d’entre nous.

    Notre temps de vie redevient un temps compté ; dans notre imaginaire,  on passe de la certitude d’avoir le temps à celui de l’incertitude de ne pas en avoir suffisamment ; de la maîtrise de notre vie à celui de ne plus en être maître. Nos sociétés ont gommé ce qui avait l’ordinaire  de notre vie, fixé les limites de notre temps,  étaient les vraies contraintes de nos progrès et de notre développement, les vraies sources  d’inégalités (seuls les nantis pouvaient vivre vieux pour le plus grand nombre) : les maladies infectieuses. Nous avions en fait oublié ce qui a été toujours présent. Les barrières dont on croyait qu’elles nous protégeaient étaient bien illusoires. Cette vérité bouleverse nos sociétés dans l’actualité de la Covid 19, en attendant les autres ?

    La crise de la Covid est ainsi une crise de l’espèce humaine ramenée à sa réalité.

    Que peut et doit faire l’assurance ?

    Doit-elle inventer de nouveaux mécanismes de solidarité financière et de nouveaux services quand les Etats ne peuvent pas tout faire et devront laisser la place aux acteurs économiques ?

    Il n’y a pas de progrès sans que l’assurance offre de solutions aux risques de la société. Le risque de la Covid remonte aux temps les plus anciens de notre existence : une insécurité existentielle quand l’assurance est le fournisseur de la sécurité aux côtés des Etats qui ne peuvent pas tout assumer.

    Le poids de l’assurance en France est de 4 % du PIB pour les risques et 6 % pour l’Epargne Vie : ce poids est-il appelé à s’accroître avec de nouvelles garanties et de l’invention de nouvelles utilisations de l’Epargne Vie, pour mobiliser les ressources de l’assurance dans la maîtrise des conséquences des maladies virales ?

    L’assurance Santé offrira-t-elle des moyens, des services pour mieux prévenir et guérir ces infections, en se positionnant comme un acteur clé ?

    Aux acteurs de l’assurance de répondre.

    La réponse semble toutefois dépendre de   la perception de la crise de la Covid par les politiques et acteurs de la société.

    La Covid 19 sera-t-elle une parenthèse refermée avec la vaccination ou fera-t-elle partie des nouveaux risques, avec le climat, la technologie, le numérique ?  Les risques infectieux et viraux seraient une composante de la nouvelle panoplie de risques ; une nouvelle branche de l’assurance à traiter spécifiquement, une nouvelle source de développement de l’assurance, acteur crucial de nos sociétés, qui s’enrichirait d’une nouvelle activité.

    On ne peut que penser que la Covid et les autres « nouveaux risques » obligent les acteurs de l’assurance à se réinventer, ou que d’autres acteurs  prendront leur place, car l’assurance comme activité et prestataire de services, elle, ne peut disparaître.

  • Le secteur assurantiel est dans une transformation majeure depuis quelques années avec plusieurs éléments qui se conjuguent

    Brossard.jpgNelly Brossard

    Dirigeante dans l'assurance – dans différents types de structures : courtage, start-up, mutuelles – avec un fil rouge : le développement, l’innovation, le e-commerce, le digital, et le marketing.

    Au comité stratégique de plusieurs startup et actionnaire de plusieurs insurtech

    Membre du réseau d'experts insurtech / fintech de Blackfin

    Engagée pour la parité hommes/ femmes dans l'assurance et dans la Tech

    Site : nellybrossard.com

    LinkedIn : linkedin.com/in/nelly-brossard

    Twitter : @nelbro

     

    Des réglementations plus intenses, l’apparition de nouveaux risques liés à la technologie et des risques naturels liés aux changements et aléas climatiques et de nouveaux besoins et marchés (vieillissement de la population, chômage, dépendance, santé, protection des entrepreneurs…).

    L’évolution des comportements et attentes des consommateurs se traduisant par à la fois de nouvelles formes souhaitées d’assurance (assurance à l’usage, comportementale, multiplications des offres de niches…) et surtout une toute autre expérience et relation clients attendue pour répondre à ces évolutions. En effet, l’expérience client a pris une place de premier plan et chaque acteur doit proposer une excellente expérience durant tous ses contacts et interactions avec les clients pour répondre à ces attentes et que chacun vive une expérience unique.

    Par ailleurs, un besoin d’engagement fort, d’impact, de transparence, de confiance est vivement demandé aux entreprises d’assurance à la fois par les consommateurs et les collaborateurs. 

    Enfin, l’environnement concurrentiel s’est fortement intensifié – une concurrence devenue internationale – avec l’arrivée de nouveaux acteurs sur ce marché (insurtech, GAFA, BATX,…) et l’utilisation du digital et des technologies (data, Intelligence Artificielle, objets connectés, blockchain…) sur l’ensemble de la chaîne de valeur, et le développement des écosystèmes ouverts (les plateformes) et les évolutions fortes des systèmes d’informations (« APIsation » et le développement de l’« open insuring »).

    Au regard de ces éléments, le secteur de l’assurance doit donc impérativement faire évoluer en profondeur ses modèles, devenir réellement centré sur les clients avec des produits et services adaptés, simples, beaucoup plus transparents, et personnalisés. Il doit s’engager dans la croissance économique durable, et surtout, développer une relation de confiance plus que jamais nécessaire et attendue, et ce, d’autant plus avec cette crise sanitaire et économique que nous vivons actuellement. Celle-ci constitue un accélérateur de transformation à la fois pour les grands groupes, car elle a davantage mis en lumière certaines attentes très fortes des consommateurs et partenaires – proximité, digitalisation, transparence, préservation du pouvoir d’achat, qui doivent aller beaucoup plus vite, et aussi pour tous les acteurs sur ce marché.

    Pour répondre à ces enjeux et attentes majeurs, deux grandes voies d’évolution s’offrent pour les « assureurs  classiques / grands groupes » afin de se développer, trouver de nouveaux relais et créer de la valeur.

    La première voie est de choisir de s’intégrer aux plateformes existantes et aux nombreuses  plateformes à venir (mobilité, habitat, santé, bien-être…) pour concevoir et fournir les offres d’assurance adaptées et pouvoir s’intégrer directement dans les différents biens et services (avec une assurance embarquée) et / ou dans les parcours des consommateurs (e-commerce). Pour ce faire, l’ouverture et l’APIsation du système d’information et l’agilité pour mettre à disposition les offres avec ces plateformes, insurtech ou partenaires sont clés…

    La seconde voie est de décider d’aller bien au delà du rôle d’assureur actuel et du cœur de métier et de créer sa propre plateforme avec des partenaires et différents écosystèmes pour devenir un véritable « offreur de solutions et de services larges » vers les clients. Des services proposés dans le cadre d’une relation clients forte, de confiance, basée sur une connaissance clients et des interactions très fréquentes. Il s’agit de devenir l’interlocuteur et le lien privilégié du client durant toute sa vie pour lui proposer avec d’autres acteurs et partenaires des produits, des conseils et des services toujours parfaitement adaptés à ses besoins et personnalisés. Cela nécessite de considérer le parcours du client dans son ensemble et d’être toujours le point de contact privilégié de l’assuré et de devenir de vrais partenaires et alliés du quotidien, et de toujours être en mesure de lui apporter une solution… Ma conviction est que cette seconde voie est vertueuse et constitue pleinement le rôle de l’assureur.

    Une nouvelle ère s’ouvre pour l’assurance, plus ouverte, avec des services élargis, une relation plus forte, plus digitale et plus humaine et fortement engagée dans la croissance économique durable.